« Sans l’habit, l’homme n’est rien » 

 La S.A.P.E. La Société des Ambianceurs et des Personnes Elégantes. Un acronyme pour désigner cette communauté d’africains vêtus de costumes chics aux couleurs éclatantes. Ils viennent pour la plupart du Congo-Brazzavillle. Ils s’appellent Gentleman, Le Grand Bachelor, Le Keynésien ou encore Kookaye. Ajustant leurs cravates colorées, exhibant leurs costumes griffés, ils se plaisent à déambuler dans les rues de Château-Rouge, quartier africain emblématique de Paris, connus et acclamés de tous. Il faut remonter aux années 1920-1930 pour comprendre l’origine du mouvement. Les colons français transmettent alors une certaine notion de l’élégance aux congolais, et lors de l’Indépendance, ces derniers commencent à se vêtir de costumes 3 pièces et à s’exhiber dans les rues du quartier de Bacongo, créant l’admiration des habitants. Depuis, le mouvement s’est propagé en France, s’est théorisé et on parle désormais de sapelogie. La Sape n’est plus seulement une mode. Elle devient un art, une philosophie, une religion, avec ses règles et ses « 10 commandements ». Il n’est plus question de vêtements aux couleurs grises et monotones. Eté comme hiver, on mise sur le chatoyant. Place au bleu électrique, au jaune vif et au rose fuchsia. Une attention toute particulière est accordée à l’assemblage des couleurs. Pas plus de trois, et assorties. On parle de « trilogie des couleurs » ; un principe de base. Toutes les classes sociales sont concernées. De l’homme d’affaires à l’ouvrier. Peu importe les sommes dépensées, on y met tous les moyens. Aux mariages comme lors des veillées funéraires, les sapelogues sortent leurs plus beaux habits, et les accessoires qui vont avec. Pipes, cannes à pommeau ou cigares font souvent bonne impression. Ils paradent, s’exhibent, affichent les marques jusque sur les chaussettes en remontant leur pantalon et se pavanent sous les regards accusateurs des puristes ou bien la fascination des curieux. Il faut se montrer le plus possible, quitte à en faire des tonnes. Tous parlent de frime, mais étonnamment, ce mot n’a pas de consonance péjorative à leurs yeux. Aujourd’hui, le mouvement a pris une telle ampleur que même un grand couturier, Paul Smith, s’est inspiré de leurs tenues excentriques pour un défilé de mode en 2009. On les voit partout, ils passent à la télévision, font parler d’eux, créent la controverse. Mais peu importe ce qu’on peut dire d’eux. Ils vivent pour la Sape, et comme le dit le dicton : « Un congolais heureux est un congolais bien habillé ».

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